A l’occasion de la sortie de Comment j’ai tué sept personnes avec une agrafeuse le 4 juillet prochain, je vous propose un petit aperçu du début de l’histoire :)
Du 29 juin au 3 juillet, vous pourrez donc découvrir chaque jour un nouveau petit chapitron du roman.
Bonne découverte bigsmile
Confession
— Bonjour. Que puis-je pour vous ?
— Je viens me rendre.
— Vous rendre ?
— Eh bien, oui. C’est bien un poste de police ici ?
— Ça l’est. Mais il va me falloir plus de détails.
— Des détails ? Je viens me rendre, je vous dis.
— J’ai compris, oui. Mais pourquoi ?
— Sans raison. J’étais dans le coin et je me suis dit que je passerais bien les vingt prochaines années en prison.
— Pardon ?
— Je plaisantais. Je viens me rendre parce que j’ai commis un crime.
— Vous pouvez détailler ?
— Je peux. Mais ça peut vite devenir assez pénible, aussi bien pour vous que pour moi.
— Je ne peux pas vous arrêter si vous ne me dites pas ce que vous avez fait.
— Je vous aurais prévenu.
— Qu’est-ce que vous avez fait ?
— Vous savez, vous ne devriez pas vous énerver comme ça. Il y a votre grosse veine, là, au cou, qui palpite bizarrement.
— Laissez donc mes veines tranquilles et dites-moi ce que vous avez fait !
— Vous avez de quoi noter ?
— Ça devient pénible, vraiment.
— Oh, ça va, je me renseigne.
— Et donc.
— Et donc… Vous auriez l’heure ?
— Midi.
— Déjà ?
— Déjà.
— Le temps file. Quand je les ai quittés, c’était à peine dix heures. Ce n’était pas vraiment joli à voir, si vous voulez mon avis.
— Quand vous les avez quittés ? Quand vous avez quitté qui ?
— Les cadavres.
— Les cadavres ?!
— C’est ce que je viens de vous dire.
— Les cadavres de qui ?
— Vous savez, c’est vraiment une très longue histoire. Vous n’auriez pas un verre d’eau ?
— Non.
— C’est dommage qui vous vous braquiez comme ça.
— Les cadavres de qui ?
— De gens. Vous ne les connaissez pas, de toute façon. Enfin, j’espère pour vous.
— Donnez-moi les noms !
— Ah, je vous ai donc intéressé.
— Les noms !
— Ils ne vous serviront à rien.
— Dites-moi au moins combien il y a de cadavres !
— À vue de nez, une petite septaine.
— Sept cadavres ?!
— C’est ça. Franchement, ce n’était pas un spectacle des plus ragoûtants.
— Mais… attendez, on reprend.
— Vous n’êtes pas très rapide, quand même. Pas étonnant que vous soyez à l’accueil.
— C’est un choix.
— Oui, oui. Répétez-vous ça si ça vous fait plaisir.
— Mais enfin, je suis très content de rester à l’accueil.
— Donc quoi, vous n’avez jamais rêvé d’être un détective ?
— Bon, peut-être une fois ou deux. Mais les détectives finissent tous dépressifs et seuls. Je préfère autant éviter, voyez ?
— Très bien. Je pense de toute façon que vous n’avez pas une tête de détective. Pas le regard assez torturé. Vous, on aurait plutôt envie de vous faire confiance aveuglément. À la réflexion, ça pourrait être une bonne qualité pour un détective.
— Vous croyez ? Parce qu’il y a un concours en interne et… ne changez pas de sujet ! Qui avez-vous tué ?
— Des gens.
— Sept ?
— Sept.
— Des hommes ? Des femmes ?
— Un peu de tout, en fait.
— Et l’arme du crime ?
— Ah ça, vous allez rigoler.
— J’ai comme un doute.
— Mais si. Des armes comme ça, je pense que vous n’en voyez pas passer souvent.
— Quelle arme ?
— Oh, vous avez une jolie collection de bouchons.
— C’est pour le recyclage.
— Je ne savais pas. Mais c’est bien de soutenir des causes. Vous me donnez presque envie.
— Vous devriez. On ne se rend pas compte de la quantité de déchets qu’on laisse traîner.
— C’est sûr. Non, vraiment, vous me semblez quelqu’un de bien.
— Et sinon, l’arme du crime ?
— Non, mais vous allez vous moquer.
— Me moquer de l’arme qui a tué sept personnes ?
— Oui. Je sais, pour un tel carnage, il aurait fallu quelque chose d’un peu classe. Comme une arbalète.
— Parce que vous trouvez que c’est classe de tuer des gens avec une arbalète ?
— Pas tuer les gens avec. Mais une arbalète, ça a quand même plus de prestance que… Non, vous allez rire.
— L’arme du crime !
— Oh, dites, il est joli ce plant de cacahuètes que vous avez là.
— Il pousse bien, hein ? Il y a tout plein de petites feuilles qui commencent à sortir.
— Joli. Moi, je n’ai pas la main verte. Tout ce que je touche, ça meurt.
— D’ailleurs, en parlant de mort. L’arme du crime ?
— C’était… une agrafeuse. Vous êtes content ?
— Vous avez tué sept personnes avec une agrafeuse ?
— Voyez, vous vous moquez déjà.
— Je ne me moque pas. Mais vous avez fait quoi ? Vous avez frappé avec ?
— Frappé avec. Si seulement. Ça aurait été plus simple et plus propre. Non, c’est bien pire.
— Qu’est-ce qui peut être pire ?
— Dites, vous ne voulez vraiment pas m’arrêter ? Ce n’est pas tant que ça ne me plaît pas de discuter avec vous, mais j’ai la conscience qui me ronge. Il faut que je parle à quelqu’un.
— J’appelle le détective de suite. Mais dites-m’en plus sur ces meurtres. Si vous n’avez pas frappé, vous avez fait quoi ?
— Ça, c’est une très longue histoire. Et elle n’est certainement pas adaptée à une discussion dans un couloir plein de courants d’air. J’ai les bronches très fragiles, vous savez.
— Vous avez essayé les inhalations de vapeur de pomme de terre ?
— Et pas qu’un peu. Tous les matins avant de partir travailler.
— Et ce matin, vous l’avez fait aussi ?
— Ce matin, non. Je me suis levé trop tard. D’ailleurs, ça m’a mis en rogne. Je n’aime pas du tout arriver en retard, vous savez.
— C’est pour ça que vous avez craqué ?
— Craqué ? Oh, le mot est un peu fort.
— Vous dites quand même avoir tué sept personnes. Ne me dites pas que vous aviez toute votre tête quand vous avez fait ça.
— Toute ma tête, ça fait longtemps que je ne l’ai plus.
— Donc c’était ça, le déclencheur ?
— L’absence de patates le matin ? Vraiment, vous devriez tenter le concours en interne pour devenir détective.
— Vous croyez ?
— Non. C’est une théorie pathétique.
— Tout de suite… Ah, voilà le détective qui arrive. Allez donc lui raconter vos salades.
— Vous savez, ça ne vous ferait pas de mal d’être un peu aimable.
Merci d’avoir suivi ce début et à demain pour la suite !
auto-édition Comment j'ai tué sept personnes avec une agrafeuse